3-4 juillet 2021, un défi logistique titanesque que ce voyage en Lozère ! Mais aucun défi n’est trop grand pour les immatures Hergard qui comptent parmi leurs rangs clairsemés un certain nombre d’intelligences supérieures (dont l’auteur de ces lignes fait partie)
Réveillés par les turdoïdes dure d’oreille du Salagou gadoue, c’est avec entrain que nous avons pris la route dès l’aube, ivres de la joie que nous inspiraient les grands espaces lozériens. La voiture avalait les virages avec volupté entre les pins sylvestres car l’auteur de ces lignes (encore lui) en avait pris les commandes. Arrivés avec un retard anecdotique, nous avons fait la connaissance des quatre immatures précoces qui nous attendaient perchés sur une butte en surplomb du parking. Quand Samuel et Noé eurent terminer de visiter les chemins non-carrossables de la région et que leur épave fut garée à côté de la nôtre, nous pûmes nous atteler à ce pour quoi nous étions venus : L’ORNITHO (les orthoptères c’est rien bon qu’à gaver les martinets).
Au bout de quelques minutes de marche, nous avons repéré les premiers Vautours fauves en pleine ascension dans les pompes de la gorge. Mais ce que nous voulions trouver se cachait (mal) un peu plus loin, posé sur le sommet d’un pin à quelques dizaines de mètres à peine du chemin. Un Vautour moine et son petit déjà grand occupaient un nid construit cet hiver par un couple exhibitionniste ou pas très regardant (ou peut-être même imprégné ??). L’adulte sembla confirmer la première hypothèse en multipliant les allers-retours entre le nid et la terre ferme, cueillant par ci quelques touffes d’herbe pour le petit douillet, nettoyant par là un coin de forêt.
Nous aurions dû mettre fin à la rando dès cet instant, planter nos tentes sur le causse, manger puis dormir jusqu’au lendemain. Mais il n’en fut pas ainsi, et c’est sous le crachin que nous avons longé la corniche du Méjean jusqu’à rejoindre la voiture 3h plus tard sous le regard terrorisé des invertébrés de sortie. Le temps de sécher nos plumes et de les remettre en ordre, l’heure du goûter avait sonné. Entre la baignade, l’herpéto et le chocolat chaud le choix était cornélien, mais nous optâmes finalement pour ce dernier. Comme le temps s’améliorait, nous sommes descendus au bord de la rivière pour surprendre le Cincle plongeur et se donner quelques tapes amicales. L’eau était fraiche, les sangsues obèses et les exuvies… un qualificatif est-il nécessaire ?
Je signale ici un fait de haute gravité, à savoir que l’on a voulu m’abandonner en forêt tandis que je m’abandonnais aux rêveries que provoque l’ingestion à forte dose de menthe aquatique. Heureusement, le camarade Quentin veillait au grain et je pu rejoindre sain et sauf notre gîte nocturne de Saint-Pierre des Tripiers - partagé avec trois Couleuvre verte et jaune, quelques Moineaux soulcis, engoulevents, Bruants zizi et rossignols. Ces derniers eurent le culot de nous tenir éveiller au-delà des 22h réglementaires, s’adonnant à d’incompréhensibles jeux d’une puérilité typique des passereaux.
Le lendemain commença très tôt pour deux d’entre nous qui avaient jugé bon de tendre leur hamac sous le portique de la balançoire, bravant héroïquement les prévisions météo de la nuit. A 2h, la pluie commençait à tomber. Samuel et Gautier résistaient quelque instant avant de se réfugier dans la sinistre salle commune où ils se trouvaient toujours le lendemain (le vrai) quand ceux qui avaient dormi dans le confort indescriptible d’une tente débarquèrent avec le petit déjeuner. La pluie tombait toujours en rideaux devant la porte et ne devait cesser qu’en début d’après-midi. A la première accalmie nous nous jetâmes dans les voitures pour gagner le Causse nu et les chevaux de Przewalski de Drigas. Les Alouettes lulu se parachutaient dans les prés jaunes, celles des champs gazouillaient en vols dispersés, une caille payaient ses dettes au loin, les Traquets motteux contrôlaient les piquets, les Moineaux soulcis les fils électriques, et nous ? rien. Avant même d’avoir entendu le plus petit Bruant ortolan la pluie nous imposait à nouveau sa loi et nous nous réfugions dans les voitures, poursuivant ainsi notre traversée du désert jusqu’aux gorges en surplomb de Meyrueis, où le seul couple de Gypaète barbu de la région s’était établi quelque temps auparavant. Guère intéressés par la chose, les uns chassaient le Lézard vert tandis que les autres comataient dans les voitures, la bave aux commissures.
Pour nous, le plus dur était à venir : abandonner le Méjean, les gorges, la Lozère – sa faune, sa flore, son parnasse – pour retourner à la vie sauvage de Balaruc-le-(très) vieux, Montpellier Croque-garrigues, Pézenas-les-choucas, Villeveyrac Sur Martinet, etc.
Mais l’été est encore long et la migration encore loin à l’horizon, alors vivement les Cévennes !
Signé : la société des ornithos immatures Hergard
Ps : Merci Antoine pour avoir été notre oreille interne pendant tout le weekend et Loraine pour la logistique, la mine blasée trop cute, les p'tits gâteaux et tout le reste!
Par Hugo Juillard